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En 2022, le tout nouveau marché de l’immobilier d’entreprise

Par Emilie Vialle
Publié le 30 juin 2022
Lecture de 5 min
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Avec les événements survenus en 2 ans, le marché de l’immobilier d’entreprise a traversé un épisode inédit et, à ce titre, plus qu’intéressant.

Précisons qu’on englobe dans le périmètre de l’immobilier d’entreprise tous les actifs qui concernent le secteur tertiaire : locaux commerciaux et professionnels, bureaux, entrepôts ou encore aires de parking.

Investisseurs, locataires, bailleurs, gestionnaires et promoteurs : nous sommes allés récolter le point de vue de tous les acteurs de ce marché pour étudier son comportement.

Comment le marché a-t-il muté ? Quels sont les besoins des entreprises en 2022 ? Quelle utilisation font-elles de leurs locaux ? Comment l’offre, la demande et les prix se comportent-ils ?

La mutation de l’immobilier de bureaux

Ecrans commande

La crise sanitaire de 2020 et une situation restée instable jusqu’en 2021 ont déclenché un phénomène de mutation massive de l’immobilier de bureaux.

Un nouveau paradigme du monde professionnel : apprendre à gérer les équipes à distance, donc conséquemment à gérer des bureaux vides. L’intégration du bien-être des employés dans les politiques de l’entreprise a aussi été un énorme défi pour nombres d’entre elles. Certes la QVT (Qualité de Vie au Travail) était un sujet avant la crise Covid, mais le télétravail a accentué la nécessité de trouver une réponse efficace aux problèmes quotidiens des salariés : dégradation psychologique des conditions de travail sur site et expérimentation d’une vie quotidienne sans trajet, sans grève et sans autres difficultés de la vie en collectivité.

Le recrutement et la fidélisation des cadres sont perçus comme une priorité. Le travail hybride est devenu un levier d’attractivité pour les entreprises, qui notent des réelles difficultés à l’embauche, comme le souligne l’APEC. Fin 2021, ce sont 47% des cadres qui ne candidateraient pas à un poste qui ne permette pas le télétravail.

Mais ce n’est pas tout. Les entreprises cherchent à minorer le risque que fait peser la détention d’actifs qui se sont avérés instables durant cette période.

La réponse des entreprises se scinde en 2 catégories :

  • Celles qui ont voulu maintenir leurs équipes sous le même toit pour sécuriser leur data, et faire perdurer les habitudes de travail ➡️ Elles vont améliorer l’offre de services au sein des bureaux.
  • Celles qui ont vu une opportunité de réduire leurs coûts de fonctionnement et vont inciter au télétravail  ➡️ Elles vont diversifier leurs revenus en réinventant les espaces sous-exploités.

Diversification des usages et reconversion des bureaux

Homme souriant à son bureau

La RATP est un excellent cas d’étude de la façon dont le télétravail peut être utilisé comme un outil d’optimisation des revenus.

Les employés n’ont pas eu à convaincre la direction : dès le déconfinement, ils ont été avertis que le télétravail serait la norme 2 jours par semaine. La capacité d’occupation est devenue flexible : les occupants réservent un bureau et les espaces vacants sont loués à des intervenants externes.

Les espaces sont évidemment modulables et on a créé un business center et un espace événementiel avec catering pour les externes.

Très concrètement, c’est une nouvelle source de revenus pour la RATP, propriétaire de son bâtiment entièrement rénové en 2022 (on parle d’une enveloppe de 100 millions d’euros).

Réduire son empreinte immobilière

Intérieur bureau

Le cas de la RATP illustre la réaction d’adaptation engendrée par la désertion des bureaux. Posséder des locaux coûte cher, louer des locaux coûte cher.

L’empreinte immobilière se caractérise par les coûts d’exploitation et s’entend également en regard des coûts de rénovation (le cas de la RATP) : l’immobilier est le 2e poste de dépense des entreprises.

Dans les faits : on veut des espaces plus petits et mutualisés. Peut-être même investir dans des tiers-lieux pour remplacer le siège social centralisé, et être au plus près du lieu de résidence des employés.

Pour convaincre les salariés d’utiliser les locaux et pour les fidéliser, il faudra leur proposer une expérience inédite. Donc, on fonce sur les services bien-être, la création d’espaces extérieurs de détente, la végétalisation indoor/outdoor. C’est le cas du projet Greentech qui offrira 500m² de terrasse et 1000 m² de rooftop végétalisé.

Article projet Guyancourt

L’entreprise se veut aussi garante de la sécurité de ses employés grâce à des mesures à la fois sanitaires et environnementales, comme le contrôle de la qualité de l’air intérieur.

On cherche à faire d’une pierre deux coups et à combiner autant que possible la réduction de la dépense énergétique (moins d’ordinateurs, moins d’usagers) avec la baisse du coût du bâtiment.

C’est cette réflexion globale qui pousse la conduite du changement vers la modularité et la mixité des espaces de coworking et leur relocalisation potentielle.

Les bailleurs doivent impérativement suivre les besoins exprimés par la demande pour relancer leur taux d’occupation.

Les chiffres des prises à bail corroborent cette assertion puisqu’en 2022, on a retrouvé le niveau de début 2020 sur des petites surfaces (- de 5000 m²) (source AGEFI)

Paris, l’Île-de-France, la Défense et ses bureaux

Hall entrée

Comment, en chiffres, sont ressentis les changements dans les quartiers d’affaires, épicentres des sièges sociaux à l’ancienne ?

Immostat nous livre quelques chiffres sur le marché locatif en Île-de-France pour le premier trimestre 2022 :

La demande de bureaux en location et en transaction est en hausse de 40% par rapport au T1 de 2021, ce qui, selon les projections, placerait l’année 2022 au niveau du début 2020.

Le retard serait donc rattrapé.

Toutefois, l’offre est supérieure de 8% à celle de 2021. Ce qui peut s’expliquer par les constructions neuves qui n’ont pas encore trouvé preneurs. Comme par exemple à la Défense où les nouvelles tours (Aurore, Altiplano…) ne sont pas encore livrées mais feront passer le taux de vacance de 5 à 15% d’ici la fin de l’année.

Location de bureaux : on note une hausse de 4% sur le loyer facial des biens de seconde main, pour afficher un prix de 416€ HT/HC par mètre carré et par an contre 415€ HT/HC par mètre carré et par an pour les bâtiments neufs ou restructurés, stable cette année.

Pour comparaison, voici les chiffres du dernier trimestre 2021 : ici.

Essor du bâtiment d’activités mixte et de l’entrepôt

Entrepôt

LA grande mutation de 2021 et 2022, c’est sans doute celle de l’immobilier logistique. A considérer de très près pour des investissements devenus ultra rentables.

Stéphane Berry, Directeur du développement chez Gefec Construction et Rénovation, un constructeur spécialisé, nous raconte comment l’entreprise s’est adaptée aux nouvelles tendances du marché de l’immobilier tertiaire.

Gefec a suivi la demande des investisseurs qui, dès la fin 2020, ont marqué un report d’intérêt sur les locaux d’activités et de logistique dont la valorisation est pourtant plus délicate qu’en immobilier de bureaux. L’analyse démontre une volonté de sécuriser les investissements soutenue par une demande forte des usagers.

En effet l’activité de stockage a explosé avec le e-commerce et les nouveaux modes de consommation. Aussi, nombreuses sont les sociétés qui veulent à la fois une unité de stockage et de logistique et des petites surfaces de bureaux pour y installer leur siège social.

Il suffit de voir qui sont les preneurs à bail ou les acquéreurs des bâtiments tertiaires construits par Gefec pour comprendre l’économie de marché actuelle : outilleurs, entreprises du BTP, entreprise de la tech avec outil de production, stockage de textiles… et les foncières font construire des parcs d’activité.

C’est d’ailleurs ce que nous confirme Arthur Bana, directeur commercial de Storage24 : une croissance forte sur des cellules mixtes et modulables d’entrepôts et de bureaux.

Et pour chaque construction de bâtiment, dans le cahier des charges, on retrouve bien la création d’espaces végétalisés, de terrasses, de rooftop donc l’aménagement d’un cadre de vie plus qualitatif ; et bien sûr le cahier intègre toutes les exigences de la RE2020 et du décret tertiaire (performance énergétique et intégration architecturale).

Quelques chiffres confirment que l’entrepôt logistique est très attractif : pour la France entière, la demande représente une hausse de 31 % par rapport à 2021, et de 30% pour l’Île-de-France (Immostat).

Les nouveaux enjeux pour les investisseurs

Analyse courbe

Tout comme le preneur à bail ou l’acquéreur, l’investisseur doit repenser sa participation à l’aune des tendances 2022.

Parc d’activités, zones industrielles ou grandes métropoles : quelles que soient la typologie et la situation du local, les investisseurs fonciers doivent prendre en compte les modalités suivantes (valables aussi en immobilier commercial) :

  • Les conditions locatives : la durée du bail, le loyer, la sous-location.
  • L’efficience des surfaces : flexoffice, espaces de détente, agrandissement ou restitution de surfaces.
  • Le volet juridique : la cybersécurité des réseaux, la sécurité des locaux, la réglementation du travail et la réglementation environnementale.


Aujourd’hui plus que jamais pour des besoins d’agilité, lors de la préconisation de valeur du bâtiment, on va penser au potentiel de redéveloppement de l’actif tant à la location qu’à l’acquisition.

La santé des investissements en immobilier d’entreprise

Immostat nous informe qu’en France, le montant global des investissements a baissé de 7% au premier trimestre 2022 par rapport au T1 2021 pour se monter à 4.6 milliards €.

La baisse est plus importante en Île-de-France : – 16% aux mêmes périodes soit 2.9 milliards €.

Le prix moyen d’une acquisition de bureaux en IDF est également à la baisse de 2% pour plafonner à 8190€/m².

Un baromètre finalement plutôt positif

Les deux points qui caractérisent le marché immobilier tertiaire de 2022 : l’accroissement de la demande en entrepôts logistiques et en bâtiments mixtes, et la restructuration de l’immobilier de bureaux pour des surfaces plus petites et modulables. Les grandes surfaces génèrent un attrait uniquement si elles sont hyper centrales au cœur des grandes villes de France ou dans les quartiers d’affaires des grandes métropoles.

Emilie Vialle
CEO – Lisy
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