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Confinement et exonération de loyer : un crédit d’impôt définitivement adopté ?

Par Joane Eftekhari
Publié le 17 décembre 2020
Lecture de 2 min
Justice et loyers confinement
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Justice et loyers confinement

En avril 2020, le gouvernement avait tenté d’alléger la charge locative pour les entreprises mises en difficulté par le confinement. Après un premier échec, l’Assemblée a bel et bien adopté une mesure solide, prévue dans le Projet de Loi de Finance 2021. Cette fois, il s’agit d’une exonération de loyer assortie d’un crédit d’impôt, au bénéfice des locataires comme des bailleurs. Lisy décrypte pour vous cette mesure.

Exonération de loyer : un accord au bénéfice des bailleurs et des locataires

De nombreuses entreprises non propriétaires de leur local professionnel subissent la récession économique liée à l’épidémie de la Covid-19 de plein fouet. Et pour cause : en 2020, le PIB connaît un recul de – 10%. Pour les entreprises qui ont dû fermer leurs portes, la charge des loyers est devenue un véritable obstacle. Et ce aussi bien pour les baux commerciaux que pour les baux professionnels. Mais comment concilier une exonération de loyer, appelée de leurs vœux par les locataires, et l’activité économique des propriétaires ?

Pour y répondre, les députés ont adopté dans le Projet de Loi de Finance (PLF) pour 2021 un crédit d’impôt de l’ordre de 50% au profit de certains bailleurs. Si vous êtes soumis à l’impôt sur le revenu, la période considérée est l’année civile au cours de laquelle les abandons ont été consentis. Pour les bailleurs soumis à l’impôt sur les sociétés, le crédit sera imputé sur l’impôt dû au titre de l’exercice au cours duquel les renonciations de loyers sont intervenues.

Ce crédit d’impôt salutaire favorisant l’exonération de loyer fait suite à de premières démarches gouvernementales lors du premier confinement. Pour rappel, le gouvernement avait proposé d’alléger la charge des entreprises locataires (commerçants de proximité, petits artisans, salons de coiffure) touchés de plein fouet par la crise sanitaire. Dans ce but, des dispositions gouvernementales prévoyaient de demander aux bailleurs un renoncement spontané de leurs loyers en faveur des preneurs. Or, le régime fiscal de ces « abandons » de loyer a fait l’objet de vives interrogations. Comment imaginer une exonération de loyer sans prononcer également des mesures en faveur des bailleurs ? Aussi ce projet avait-il alors échoué et, sauf accord du bailleur, les loyers sont restés en principe dus, sauf à invoquer la force majeure pour le preneur.

Voir notre article sur les reports de loyer en avril ainsi que sur les mesures de soutien au commerce de proximité.

On ne peut donc que se réjouir que les concertations aient finalement permis de trouver un terrain d’entente vertueux. Le principe de la mesure adoptée par l’Assemblée en lecture définitive le 18 décembre, puis validé par le Conseil Constitutionnel le 28 décembre 2020, est simple. Sous certaines conditions, les bailleurs de locaux professionnels qui exonèreront leurs entreprises locataires d’un ou plusieurs mois de loyer bénéficieront d’un crédit d’impôt.

Quelles sont les conditions de l’exonération de loyer pour les entreprises locataires, et de crédit d’impôt pour les bailleurs ?

Condition du crédit d’impôt pour les bailleurs :

Côté bailleurs, ce crédit d’impôt de 50% concerne des personnes physiques ou morales de droit privé qui, sur les 3 mois de confinement d’octobre, novembre et décembre 2020, renonceraient à au moins un mois de loyer. Cela concerne des locaux professionnels hors accessoires échus (payable à une date fixée d’avance) ou à échoir. A noter : on parle de locaux accessoires pour les hangars ou les caves par exemple, qui ne sont pas intégrés au bail commercial portant sur les locaux principaux.

Conditions pour les entreprises locataires de l’exonération de loyer donnant lieu à crédit d’impôt :

Côté entreprises, elles devront remplir quatre conditions CUMULATIVES.


Condition 1 de l’exonération de loyer : le type d’activité

Pour que l’exonération de loyer fasse l’objet d’un crédit d’impôt pour le bailleur, l’entreprise locataire doit faire l’objet d’une interdiction d’accueil du public ou exercer son activité principale dans l’un des secteurs mentionnés à l’annexe 1 du décret 2020-371 du 30 mars 2020.

Sont ainsi visés par ledit décret :

  • Téléphériques et remontées mécaniques
  • Hôtels et hébergement similaire
  • La restauration (ex : restaurants d’entreprise, services de traiteurs)
  • L’audiovisuel (ex : projection de films cinématographiques et autres industries techniques du cinéma et de l’image animée)
  • Le domaine sportif (ex: location et location-bail d’articles de loisirs et de sport, enseignement de disciplines sportives et d’activités de loisirs)
  • Le tourisme (ex : activités des agences de voyage et activités connexes)
  • La culture (ex : organisation de foires, évènements publics ou privés, galerie d’art)
  • L’événementiel (ex : fêtes foraines)
  • Le transport de passagers (ex : transport aérien de passagers, location de bateaux de plaisance, taxis et véhicule de tourisme)
  • Prestation et location de chapiteaux, tentes, structures, sonorisation etc. Consultez la liste complète sur LegiFrance.


Condition 2 de l’exonération de loyer : l’effectif minimum

L’entreprise locataire doit avoir un effectif de moins de 5,000 salariés.


Condition 3 de l’exonération de loyer : la difficulté financière

Pour que l’exonération de loyer fasse l’objet d’un crédit d’impôt pour le bailleur, l’entreprise locataire ne doit pas être en difficulté au regard de la réglementation européenne du 31 décembre 2019 (ex : procédure collective de redressement judiciaire) ni en liquidation judiciaire au 1er mars 2020.

Rappelons qu’au sens européen du terme, une entreprise est considérée comme en difficulté quand au moins une des conditions énumérées ci-dessous est remplie :

  • pour une société à responsabilité limitée : lorsque plus de la moitié de son capital social souscrit a disparu en raison des pertes accumulées. Tel est le cas lorsque la déduction des pertes accumulées des réserves (et de tous les autres éléments généralement considérés comme relevant des fonds propres de la société) conduit à un montant cumulé négatif qui excède la moitié du capital social souscrit
  • pour une société dont certains associés au moins ont une responsabilité illimitée pour les dettes de la société : lorsque plus de la moitié des fonds propres, tels qu’ils sont inscrits dans les comptes de la société, a disparu en raison des pertes accumulées
  • lorsque l’entreprise fait l’objet d’une procédure collective d’insolvabilité ou remplit, selon le droit national qui lui est applicable, les conditions de soumission à une procédure collective d’insolvabilité à la demande de ses créanciers
  • pour une entreprise autre qu’une PME : lorsque, depuis les deux exercices précédents,
  • le ratio emprunts/capitaux propres de l’entreprise est supérieur à 7,5; et
  • le ratio de couverture des intérêts de l’entreprise, calculé sur la base de l’EBITDA, est inférieur à 1,0. ( voir la loi européenne à ce sujet).

Autrement dit, un bailleur ne bénéficie pas d’un crédit d’impôt si l’entreprise à laquelle il loue son local se trouvait en cessation de paiements avant le 1er mars 2020. Cela signifie que si l’entreprise locataire n’était pas en mesure de faire face à son passif (ses dettes) avec son actif disponible (voir article L631-1 du code de commerce) avant le 1er mars 2020, dans ce cas le bailleur ne pourra pas bénéficier d’un crédit d’impôt.

Ce point peut étonner de prime abord : la mesure n’est-elle pas pensée pour venir en aide aux entreprises en difficulté financière ? En fait, il s’agit ici pour l’Etat d’encadrer l’attribution de cette aide uniquement aux entreprises dont les difficultés ont été provoquées par la crise sanitaire, et non par de précédents aléas.


Condition 4 de l’exonération de loyer : la dépendance entre bailleur et locataire

Enfin, si l’entreprise locataire et le bailleur ont un lien d’ascendance ou de descendance (ex: père et fille) ou encore un lien de dépendance entre elles, le bailleur devra justifier les difficultés de l’entreprise locataire par tous moyens (ex: situation comptable de l’entreprise).

Ce lien de dépendance entre deux entreprises est défini par l’article 39.12 du code général des impôts comme suit :

“a- Lorsque l’une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l’autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ;

b- Lorsqu’elles sont placées l’une et l’autre, dans les conditions définies au a), sous le contrôle d’une même tierce entreprise”.

Bailleur : comment obtenir le crédit d’impôt ?

Vous remplissez les 4 critères susmentionnés et vous souhaitez bénéficier d’un crédit d’impôt pour l’exonération de loyer à laquelle vous avez consenti ? Il vous faut alors déposer une déclaration spéciale à cet effet, lors de la déclaration annuelle de revenu ou de résultat. Le crédit d’impôt sera égal à 50% de la somme totale des renonciations de loyers au titre de la période de confinement. En revanche, dans le cas où l’effectif de l’entreprise locataire dépasse 250 salariés, le crédit d’impôt sera retenu à hauteur des ⅔ du montant des abandons. Enfin, dans tous les cas, le montant total des exonérations de loyer sujettes au crédit d’impôt ne peut dépasser un plafond de 800,000 euros.

Bailleurs et entreprises locataires : pour vous aider à faire un choix éclairé en ces temps troublés, sachez que Lisy vous permet d’estimer en un clic le prix du loyer d’un bureau ou d’un commerce au m2, à partir d’une data de pointe mise à votre disposition en toute transparence. C’est l’une des multiples façons dont nous révolutionnons l’immobilier commercial et d’entreprise, en y apportant rapidité et objectivité pour toutes les parties. N’hésitez pas à faire appel à nous pour commercialiser ou pour acheter/louer un local professionnel.

Sources : Actualités du Droit, Asemblée-Nationale.fr (cf. Texte du projet de loi de finance)

Joane Eftekhari
Inbound manager – Ex juriste
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